La perte de vitalité récente de nombreux chênes wallons a été expliquée par l’analyse de leur croissance durant les 40 dernières années, reliée à l’histoire des stress vécus par ces arbres.

En 2014, de nombreux chênes de Wallonie ont montré des signes sévères d’affaiblissement (ils portaient moins de feuilles et poussaient très lentement), avec parfois près de 60 % de mortalité, ce qui est le signal le plus clair que quelque chose ne fonctionne pas normalement.

Il était essentiel de comprendre comment et pourquoi cela s’était produit car avoir des forêts en bonne santé est primordial dans le contexte des changements climatiques : elles fixent du CO2, un de principaux gaz à effet de serre, produisent du bois, créent des habitats pour la biodiversité, régulent le cycle de l’eau, etc. De plus, 17 % de la surface de la forêt wallonne est occupée par les chênes sessile ou pédonculé.

Nous avons donc recensé tous les « événements » qui pourraient avoir affaiblis ces arbres centenaires durant leur vie : attaques d’insectes, gels, sécheresses, qualité du sol et autres caractéristiques du lieu de plantation qui ne conviennent pas à leurs préférences.

Pour connaître leur réaction à ces stress, nous avons prélevé des échantillons de bois dans des chênes en bonne santé, dans des chênes affaiblis et dans des chênes morts en 2014, et ce dans plusieurs forêts. À partir de ces échantillons carottés à l’horizontal de l’écorce jusqu’au cœur de l’arbre, nous avons mesuré la quantité de bois produite chaque année par chaque individu car cela constitue une sorte de mémoire des stress successifs.

Les arbres morts et affaiblis ont commencé à montrer des signes de faiblesse entre 1975 et 1987 suite à des sécheresses répétées, des hivers rigoureux et des attaques de chenilles qui les ont dépouillés de leurs feuilles. Tous les autres stress vécus ensuite jusqu’en 2014 les ont empêchés de se rétablir. Les arbres ont en effet une réelle capacité à résister aux stress à condition qu’ils disposent ensuite d’une période suffisamment longue de récupération dans des conditions non stressantes.

Ce type de recherche permet de mieux comprendre la réaction des arbres aux stress répétés et donc de mieux gérer les forêts, par exemple, en diminuant la densité des arbres pour un meilleur accès aux ressources (eau et éléments nutritifs), en les plantant là où il se sentent le mieux (station adaptée), en les mélangeant avec d’autres espèces (mixité), en protégeant la qualité des sols pour que leurs racines soient les plus efficaces, etc.

En comprenant mieux le fonctionnement des arbres, on peut aussi mieux simuler leur développement dans le temps grâce à des outils de modélisation. ◆

Chercheur : Julie Losseau (UCLouvain)
Encadrement scientifique : Caroline Vincke, Mathieu Jonard (UCLouvain)